Suivre les pas d’un homme d’honneur
25 novembre 3303,
HIP 12099
Meurtri et abandonné, vide et sale, le vieux cobra avachi aux pieds de l’Orichalque présentait sa robe bleue maculée à une planète gazeuse orgueilleuse qui affichait avec fierté sa couronne d’anneaux scintillants, comme une parure outrancière. Il n’y avait que le son du vide emplissant le paysage de la planète aux roches grises. Personne ne parlait sur la passerelle, écoutant les derniers mots des journaux extraits du vaisseau échoué qu’ils venaient de retrouver. L’Orichalque avait parcouru près de cent milles années lumières pour atteindre cette importante destination : se poser aux côtés d’un cobra mythique qui continuait a défier le temps en affichant son nom devant l’éternité placide. JJ-386, en mémoire de son propriétaire depuis si longtemps disparu mais jamais oublié. John Jameson avait laissé là sa monture, brisée et trahie, comme il l’avait été lui même.
La voix forte et grave de Jameson emplissait les coursives de l’Orichalque, diffusant les derniers mots d’un héros connus de tous les pilotes de la Galaxie. Jusqu’alors on parlait de mythes, de légendes. Demain ce serait une Vérité, un fardeau que tous devraient porter. Ce héros inégalé transmettait un héritage terrible à tous ceux qui lui avaient survécu, générations après générations.
Alvinia ne disait rien, affichant un masque vide et désolant, ne laissant rien transparaître. En écoutant l’histoire enfin révélée de ce pilote, elle s’affaissait sous le poids de la honte et de la colère. Ils avaient osés, sacrifiant tout ce qui se mettaient sur leur chemin. Ils avaient prononcés la sentence et le bourreau avait fait son oeuvre, transportant la mort dans le ventre d’un cobra bleu.
Venait maintenant le temps de suivre les pas d’un homme d’honneur qui avait déclenché l’apocalypse au nom de ceux qui n’avaient pas le courage de le faire eux-même. Ils allaient payer. Elle le jura, hurlant sa colère au cosmos. Ils paieraient jusqu’au dernier. S’il fallait combattre les Thargoids, la Wing Atlantis le ferait, mais elle combattrait avec autant d’ardeur ces hommes dangereux qui se réfugiaient derrières leurs dogmes et croyances pour justifier les pires ignominies.
Il fallait cesser de croire à la rédemption et se tourner vers une terra inconita où naîtrait l’Homo Novus. Dans les traces d’un Homme d’Honneur devenu bourreau, ils faudrait cheminer pendant des millénaires. Mais au bout du chemin se trouvait la seule issue possible. Déméter n’était plus un espoir, il devenait un salut.
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