Mark, journaliste

Mark, journaliste de la Horde

C’était enfin le grand jour, le jour du vol inaugural ! Mark avait son brevet de journaliste enfin en poche, après 2 ans d’études sérieuses et studieuses, spécialisation « Reporter en exploration » et option « Ethnologie ».

 

Il avait trimé pour se payer un vaisseau, certes un petit vaisseau, mais les petits boulots disponibles sur les mondes et stations de Gliese 867.1 étaient aussi rares que mal payés. Mark avait quand même réussi à glaner 50000 crédits en 7 ans. Qu’il avait investi dans un Hauler d’occasion dès son arrivée à Tehuevi. Cet appareil n’avait apparemment jamais eu fière allure, et les finances de Mark n’allaient pas aider à changer cet état. Mais il volait (enfin il décollait), et l’ancien propriétaire avait juré à Mark qu’il était capable de sortir de l’atmosphère de Ford Port, où il rouillait quelque part dans un garage. Il ne fallait pas faire le difficile, Mark avait tenté de négocier sa casserole à 45000 crédits, et après de long et difficile pourparlers, le prix final et définitif fut fixé à 50000 crédits. Mark n’était pas bon négociateur, mais il s’en fichait, son objectif de carrière n’était pas d’aller vendre des tonnes d’uraninite ou de palladium avec un T-9 rutilant, son but à lui, c’était de vadrouiller dans les systèmes approchants, et de faire découvrir à la galaxie entière des tranches de vie de populations souvent perdues sur un caillou à atmosphère, des mineurs taciturnes au grand cœur, des administratifs cachés derrière leur montagne de documents dans les bureaux les plus sombres d’une station Coriolis. Ce n’était pas l’aventure, le combat, le danger que recherchait Mark, c’était le quotidien, le commun, les choses qu’on taisait parce que ce n’était pas, soi-disant, intéressant.

 

Plus tard, Mark se l’était promis, il allait partir loin de la bulle, et à défaut de trouver de fades civilisations à décrire, il s’épancherait sur les merveilles cachées des étoiles, des nébuleuses, des corps célestes, et sur ces trous noirs dont tout le monde parle et que personne ne voit, et pour cause !

 

Mai 3303, vers le 21, Mark avait enfin découvert son vaisseau, il était resté 2 heures au poste de pilotage, comme un gamin, découvrant chaque bouton, chaque écran. Ces derniers mois, il avait rajouté à ses études de journalisme, un cycle rapide de pilotage de vaisseau. Il avait obtenu le premier permis, celui qui permettait d’acquérir un vaisseau de petite taille et de le faire voler. Mais toute son expérience était basée sur des simulateurs. Il avait obtenu son diplôme de journalisme le 15, le 18 il embarquait pour Ford Port dans le système Tehuevi, le 19, il négociait son vaisseau, le 20 il obtenait le permis, le 21, il était dans le cockpit.

 

Cependant, la situation était plutôt difficile. Il n’avait plus rien, plus d’attache familiale, ses parents ayant disparu dans un bête accident agricole sur une bête exploitation, elle-même située sur une bête planète locale. Il n’avait pas non plus de relations notables, qui aurait pu l’aider à se lancer dans la profession, et son dernier contact, son maître de stage, avait été licencié manu militari, et enfermé dans la foulée, car jugé diffamatoire et contre-révolutionnaire par les autorités du secteur. Mark avait donc tout intérêt à quitter le système assez vite, avant qu’on ne s’intéresse aussi aux stagiaires de cette feuille de chou, qui critiquait les méthodes peu écologiques de certaines multinationales agricoles. Tout ceci allait parfaitement avec son compte en banque, qu’il n’avait plus par ailleurs, puisque vidé de tout crédit depuis son achat du Hauler. Alors qu’il trainait son sac à dos, alourdi par l’intégralité de ses possessions terrestres, en direction du « Cours Toujours », nom de baptême de son vaisseau, il bouscula, sans velléité aucune, un commandant de vaisseau. L’affaire aurait pu s’arrêter là, mais Mark et ce commandant établirent le contact, et décidèrent de poursuivre les présentations au bar le plus proche, à 2 pas des hangars des vaisseaux. Mark détailla sa vie, son vaisseau, ses envies, et ce commandant écoutait, amusé. 2 heures étaient passées quand le commandant lui dit : « Mark, ton histoire me touche, et pour ma part, je vais devoir quitter Tehuevi pour longtemps, peut-être pour toujours. J’aimerai rester en contact, car connaître un journaliste en devenir est toujours une bonne chose. Je suis passé par 3 systèmes lors de mon retour du Formidine Rift, et j’aimerai que tu commences là ta carrière. Si tu veux, je te paye 5000 crédits pour me faire un reportage sur ces 3 systèmes, dis ce que tu veux, et revends à qui tu veux ce reportage, indique moi juste que tu l’as fait, et envoie moi une copie. Et si je trouve ça génial, je te redemanderai une pige ou 2 à l’occasion, qu’en penses-tu ? »

 

Mark en pensait que gagner 10% de ce qu’il avait mis 7 ans à gagner en 30 secondes était une bonne nouvelle ! Et accepta sur le champ cette demande de reportage. Il était désormais journaliste privé, pour un explorateur, ou quel que soit son métier, répondant au nom de vol de SteFBlood. Il partit à toute bringue dans son Hauler, lançant les moteurs, demandant la permission de décollage, fermant les écoutilles et une fois enfermé dans son caisson de métal, il se mit à hurler de joie : « Chnoumis, me voilà ! »



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