Crépuscule

Crépuscule – Chapitre 5

Je n’en peux plus.

Je ne veux plus de cette double vie que je mène depuis trop longtemps. Je ne supporte plus tous ces mystères, tous ces secrets trop lourds à porter, toutes ces trahisons.

Le temps des mensonges est terminé.

Je suis Ptoléméus.

Et je vais raconter mon histoire.

 

En hommage respectueux aux créateurs d’Elite : Dangerous, à la Wing Atlantis, aux Black Birds – et au cmdr Aymerix,  celui par qui les aventures arrivent.

 

 

Chapitre 5

Les Docks

Nous dévalons les escaliers, enchaînons les ponts, traversons les coursives. Les boutiquiers qui levaient leurs volets de fer nous jetaient un regard réprobateur en nous voyant traverser en courant les avenues de la station. A chaque croisement, nous craignions de heurter une patrouille. Munnin devait déjà être remis du coup de disrupteur, et avait dû lancer contre nous les forces de sécurité. Je ne fus pas surpris d’entendre derrière nous une voix qui nous héla de loin.

– Eh vous deux ! Arrêtez !

La police est à nos trousses. Nous courons à perdre le peu de souffle qui nous reste. La sueur colle à ma combinaison.  J’entends se rapprocher le bruit des bottes à gravité de nos poursuivants. Un rayon paralysant – à moins que ce ne soit une boule mortelle de plasma – siffle à mes oreilles et vient s’écraser sur le mur à côté de moi.

Je suivais toujours Mary. En espérant qu’elle avait un plan. Soudain, elle s’arrêta, se mit à couvert derrière une pile de caisses métalliques, et arrosa nos poursuivants d’une salve nourrie de son disrupteur.

– Prends la deuxième à droite. Je te rejoins chez Mitchell. Vite, je ne les retiendrai pas longtemps !

Je me ruai vers la sortie qu’elle m’indiquait, et me retrouvai sur une mezzanine ; j’étais revenu devant l’immense cylindre creux qui occupait tout l’intérieur de la station, et accueillait le ballet incessant des vaisseaux entrant et sortant par l’ouverture rectangulaire ménagée vers le vide du cosmos. L’Almageste était docké devant moi, sous l’un des pads, au fond de la base spatiale. Trois bons kilomètres à franchir. A ma droite, une grande arche marquait l’entrée des entrepôts de marchandises qui transitaient par la station avant d’être acheminées vers les planètes de Munfayl ou exportées vers les systèmes voisins. Virevoltant comme des abeilles industrieuses entre les rangées de denrées et de matériaux, des tracteurs-navettes jaunes chargeaient et déchargeaient les soutes des navires de transport.

Mary me rattrapa.

– J’en ai descendu un. Ils ne s’attendaient pas à ce que je réplique.

Elle m’entraîna vers un homme barbu vêtu d’un uniforme composé d’une veste bleue et d’une chemise blanche, le képi vissé sur la tête. Derrière un guichet vitré, il contrôlait les transactions, levant la barrière et laissant passer les véhicules lorsque les commerçants s’étaient acquittés du coût de leurs acquisitions et des taxes afférentes.

– Mitch ! On a un problème.

Le douanier fronça les sourcils. Évidemment, il ne me reconnaissait pas.

– Les flics sont sur nous. Fais quelque chose.

Mitch hésitait. Il avait toujours été fidèle au Munfayl Labour, et n’avait jamais admis la prise de pouvoir de Samson par les Black Birds. Il avait prêté allégeance de bouche à ses nouveaux maîtres, mais il prenait souvent le risque de secourir leurs ennemis. S’il avait reconnu Rapture LVIII, il lui aurait à coup sûr offert son aide, mais les traits inconnus du Commandeur Ptoléméus lui inspiraient visiblement de la défiance.

– C’est un ami. Un très bon ami à nous. Mitch, s’il te plaît ! La patrouille sera là d’un instant à l’autre !

L’agent des douanes prit sa décision d’un coup.

– Quel pad ? demanda-t-il, lapidaire.

– Le numéro quinze, au fond, près des services du spatioport.

Il désigna du menton un conteneur en attente de livraison. Nous comprîmes aussitôt ce qu’il projetait. Au prix de quelques acrobaties, nous parvînmes à nous glisser à l’intérieur, dans les maigres interstices que nous laissait une envahissante cuve d’hydrogène liquide. Presque aussitôt, une grue vint fermer le conteneur et nous plonger dans l’obscurité. Mitch, qui s’occupa autrefois d’un marché noir, s’y entendait pour planquer toute sorte de contrebande ; les Black Birds ne viendraient jamais nous chercher ici.

Dans le noir, contorsionnés dans le peu d’espace libre dont nous disposions, nous laissâmes d’abord le temps à nos poumons et à nos coeurs de reprendre une allure normale. Nous avions tant de questions à nous poser que nous ne savions par où commencer. Je fus le premier à prendre la parole.

– Comment m’as-tu retrouvé ?

– Comme j’arrivais au Perséphone, après avoir reçu ton mystérieux message, je t’ai aperçu marchant derrière ce gros type aux allures de videur, et j’ai compris que quelque chose n’allait pas. Je vous ai suivis, et j’ai pu intervenir quand je me suis rendu compte que la situation tournait au vinaigre. Tu connais la suite. Mais quelle folie t’a conduit à revenir ici ? C’est du suicide !

– Je voulais juste te revoir, Mary.

– Menteur.

Je connaissais Mary depuis longtemps. Je l’avais rencontrée à l’époque où j’étais encore à la solde des Black Birds. J’avais reçu l’ordre de ramener à Shangdi le docteur Curry, une jeune chercheuse prometteuse, spécialiste des artefacts alien ; les Fédéraux l’avaient capturée dans l’espoir qu’elle se mette à leur service. Au moment de son enlèvement, j’étais le seul pilote disponible, et j’avais donc aussitôt été dépêché pour tenter de la libérer. Je volais dans un petit Cobra à l’époque, et il me fallut affronter en solo un Dropship escorté par trois Eagles surarmés. J’en vins à bout après une longue bataille qui laissa longtemps de cuisants souvenirs à la coque de mon appareil. Mais enfin, la mission fut un succès : je réussis à récupérer la prisonnière et à la ramener saine et sauve au Laboratoire de Recherches Alien ; par la suite, nous sommes restés amis. Après les événements qui ont conduit à ma défection des Black Birds, Mary avait renoncé à son poste et à la brillante carrière qui s’offrait à elle pour rallier le Munfayl Labour. Depuis, elle animait un réseau clandestin de résistance contre le Consilium. En guise de couverture, elle occupait un petit boulot de contrôleuse d’appontage à Samson.

Je lui racontai comment j’avais appris à Deciat les derniers événements survenus ici, et pourquoi j’avais pris la décision de retrouver Alvinia. Mary secouait la tête.

– C’est de la démence ! Pourquoi faire confiance maintenant à celle qui a orchestré ta condamnation ?

– Elle a compris qu’elle faisait fausse route, son départ le prouve. Sa belle carapace de certitude est en train de se fissurer. Et lorsqu’elle sera prête à admettre la vérité, elle aura besoin de moi.

– Tu te trompes. Je la crois au contraire plus déterminée que jamais. Elle en veut mortellement au L.A.R.A. Elle soupçonne mon ancien patron, le professeur Samuel, d’avoir dissimulé des informations, voire de jouer double jeu.

– Je veux en avoir le coeur net. Il faut que je parle à Alvinia. Tu peux m’aider à la retrouver ?

Mary soupira.

– Je ne sais pas grand-chose. On raconte beaucoup d’histoires au sujet de son départ, et elles ne concordent pas toutes entre elles. Il semble qu’elle ait troqué son éternel Cobra contre un Anaconda qu’elle a aménagé en vaisseau-amiral, l’Orichalque.

– C’est ainsi qu’on appelait jadis, sur Terre, le métal légendaire des Atlantes…

– Atlantis, tel est justement le nom qu’elle a donné à son escadrille. Aidée d’une poignée de fidèles, elle vit de rapines et de piraterie. On dit qu’elle organise des expéditions secrètes. On raconte qu’elle envoie des navires dans le Rift…

– Quoi ?

– Elle aurait donné l’ordre à ses partisans de quadriller le secteur afin de cartographier les planètes à atmosphère d’ammoniac.

Je serrai instinctivement mon sac de toile.

– Il faut vraiment, vraiment que je lui parle.

Du plat de la main, le docker chargé de nous amener sur le pad numéro quinze fit retentir trois coups sourds sur la paroi métallique de notre conteneur. C’était le signal que nous étions arrivés à destination.

– Attends, me lança Mary.

Elle se hissa en haut du conteneur. Un rai de lumière éclaira brièvement le caisson lorsqu’elle ouvrit la trappe, qui se referma presque aussitôt.

– La voie n’est pas libre. Trois flics gardent le pad, me murmura-t-elle dans l’ombre.

 


un commentaire

  1. Xhyvor
    22 mai 3303 à 15 h 18 min

    Salut Super recit !
    La suite …. la suite !!!! 🙂

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